Dans une étude publiée le 4 octobre 2017, la Dares, Service des statistiques du ministère du Travail, se penchait sur les caractéristiques des nouveaux recrutements en CDI ou en CDD de plus d’un mois. L'étude a permis d'interroger, entre mars et juin 2016, 8 510 entreprises ayant recruté en CDI ou en CDD de plus d'un mois entre septembre et novembre 2015. Elle s’attache uniquement aux "nouveaux recrutements", ce qui exclut donc les réembauches par un employeur d’un même collaborateur.
Comment les employeurs recrutent-ils aujourd’hui leurs salariés ? Avec le développement des nouvelles technologies de l’information dans les procédures d’embauche, quels canaux mobilisent-ils le plus pour recruter ? Si le digital a changé certains usages, de nombreuses pratiques traditionnelles perdurent.
Numérique : le site Internet utilisé par 4 entreprises sur 10
Si seulement 26% des établissements disposent d’un service RH, dont l’existence dépend principalement de la taille de la structure, deux entreprises sur trois disposent d’un site internet. Parmi celles-ci, six sur dix l’utilisent pour recueillir des candidatures. Globalement, 41% des employeurs sollicités pour l’étude s’appuient sur leur site Internet pour embaucher.
Par ailleurs, pour 45% des recrutements, Internet a été directement mobilisé pour diffuser des annonces ou consulter des CVthèques. Cependant, de façon assez surprenante, l’usage du numérique trouve rapidement ses limites dans le traitement des candidatures. Ainsi, seuls 7% des employeurs sont équipés de logiciels spécifiques de gestion des candidatures. Ces derniers concernent presque toujours les grandes entreprises ou groupes, mais on relève que les structures de 200 salariés et plus ne sont que 33% à disposer de tels outils. Ainsi, seules 21% des candidatures recueillies via le site Internet de l’entreprise font l’objet d’un traitement informatisé.
Les méthodes traditionnelles font de la résistance
Enseignement intéressant de l’étude, 3 canaux sont activés en moyenne pour chaque recrutement, mais le numérique ne s’y taille pas la part du lion. En effet, alors que les les outils de recrutement digitaux toujours plus élaborés se multiplient, dirigeants et DRH témoignent d’un attachement fort à certaines pratiques de l’entreprise du XXe siècle.
Premier constat, ce sont les relations personnelles et professionnelles qui débouchent le plus souvent sur des embauches. Les employeurs y font appel pour plus de la moitié de leurs recrutements (53%), et 27% de ces candidatures aboutissent à la signature d’un contrat de travail. On note que, pour 12% des recrutements en France, ce « canal du réseau » est le seul à avoir été mis en œuvre dans la procédure.
De leur côté, les candidatures spontanées représentent le canal de recrutement auquel les employeurs ont le plus recours quand ils cherchent à pourvoir un poste. L’enquête nous apprend qu’un recrutement sur cinq (21%) en est issu.
Autre canal utilisé par les patrons pour un tiers de leurs recrutements, les intermédiaires publics tels que Pôle emploi permettent de recueillir des candidatures, mais il faut noter que seules 13% de celles-ci débouchent sur la signature d’un contrat. Le constat est le même pour les autres intermédiaires que sont les centres de formation et les entreprises d'intérim aux coûts parfois complexes.
Enfin, côté candidats, la digitalisation n’est pas encore universelle puisque 92% des employeurs reçoivent encore des candidatures par courrier postal ou en mains propres.
Des canaux spécifiques à certains profils et secteurs
Selon la Dares, les deux canaux les plus prisés des recruteurs – les relations personnelles et professionnelles et les candidatures spontanées – permettent plus souvent de recruter pour des postes peu qualifiés, qu’il s’agisse d’employés ou d’ouvriers. En ce qui concerne les professions intermédiaires, les employeurs ont plus volontiers recours à la diffusion d’annonces : ce procédé est, par exemple, privilégié pour les postes de commerciaux ou technico-commerciaux. Néanmoins, les emplois de secrétariat, de saisie ou d’accueil restent plus souvent pourvus via des intermédiaires publics comme Pôle Emploi. En ce qui concerne les cadres, notons que le recrutement n’aboutit quasiment jamais via Pôle Emploi.
Par ailleurs, certains canaux de recrutement sont davantage en usage dans des secteurs donnés. Dans la construction, par exemple, les employeurs privilégient avant tout le réseau (professionnel et personnel). C’est aussi le cas dans une majorité de TPE ou d’entreprises récentes, ce qui paraît logique : ayant moins l’habitude de recruter, ces dernières font davantage confiance à leur réseau pour dénicher les candidats correspondant à leurs besoins.
Si l’enquête de la Dares témoigne de la transformation digitale de l’entreprise, il en ressort surtout que le recours aux méthodes traditionnelles a toujours largement cours dans le domaine du recrutement. L’étude révèle d’ailleurs que le très classique entretien individuel est la méthode la plus utilisée par 88% des recruteurs pour sélectionner les candidats, malgré les autres possibilités offertes par le digital. En fait, l’enjeu pour beaucoup de recruteurs – surtout dans le contexte d’un marché de l’emploi qui reste tendu – se situe peut-être moins dans la difficulté à recruter que dans l’optimisation des ressources recrutées. Dans ce dernier domaine, le ROI de l’innovation digitale paraitra sans doute plus direct à nombre d’employeurs.