Confinement, couvre-feu, protocole sanitaire, cas contact ou contamination chez les salariés… L’activité d’une entreprise, notamment franchisée, est mise à rude épreuve par la COVID-19. La solidarité et l'entraide à l’échelle du réseau peuvent permettre de maintenir le niveau d’activité. Une condition : décloisonner les équipes.
Échapper au couperet de la COVID-19
Depuis mi-mars 2020, les entreprises vivent dans une totale incertitude. Il faut pourtant payer les factures, les salaires et surtout garder le lien et la confiance des clients. La crise sanitaire s’installe dans la durée. L’impossible anticipation des absences inopinées des salariés - test positif, cas contact... - passe de l’exception à la norme. Ainsi, en quelques instants, un site peut voir une grande partie de ses salariés devenir indisponibles. Un danger qui touche, en particulier, les petites unités comme une boutique en centre-ville, où le nombre de salariés est structurellement très limité. Pour le gérant, si son enseigne n’est pas en capacité de rester ouverte, c’est une perte immédiate de chiffre d’affaires… sauf s’il dispose d’une solution qui lui permet de trouver du personnel remplaçant au pied-levier.
La plupart des franchisés sont très attachés à leur autonomie et leur autorité : ils sont propriétaires du site, des stocks et gèrent eux-mêmes leurs équipes. Pourtant, à l’inverse d’une PME livrée à elle-même et isolée, le chef d’entreprise franchisé dispose d’un atout considérable : un réseau pour capitaliser sur la marque, sa visibilité et l’accompagnement du franchiseur. La période actuelle est propice pour mettre en place une solidarité encore plus grande pour résister.
Franchisés : des concurrents alliés
Alors quel rôle joue aujourd’hui le franchiseur dans sa relation avec le franchisé ? Il intervient pour accompagner les fonctions de management en leur mettant à disposition :
- les équipes du siège
- des outils techniques
- des prestataires de services
- une approche marketing...
Il transmet aussi ses recommandations sur la gestion de l’entreprise. Chaque franchisé effectue son propre choix et l’adapte au contexte de son entreprise en voyant les autres franchisés comme des concurrents. Jusqu’à présent, une majorité de réseaux de franchise se sont tournés vers ce modèle parce qu’il permet une plus grande indépendance et évite au franchiseur de gérer les tracas du quotidien. Chaque franchisé prend ses responsabilités en la matière.
Avec la crise sanitaire, cette notion de compétition entre franchises évolue, afin de maintenir le maximum de chiffre d’affaires. Et puis, l’intérêt d’être en franchise tient en ce que chaque franchisé contribue à l’existence de la marque, à son rayonnement et à son développement. Si plusieurs sites ferment, c’est l’image de tous les autres qui est écornée. Or, la force d’un réseau vient justement de cette capacité à s’aider quand un franchisé en a besoin. Contrairement aux idées reçues, se soutenir ou se serrer les coudes ne réduit pas l’autonomie d’une entreprise franchisée. La liberté de décision reste la même, tout en ayant des approches, des outils et des réflexes plus collaboratifs. On peut même parler de plus grande résilience et de robustesse du modèle économique.
Ce qui vaut pour l’achat des produits en centrale, ou pour le système informatique par exemple, peut aussi s’appliquer à la gestion du personnel. Il ne s’agit pas de savoir ce qui se passe dans le magasin le proche ou de tenter de s’approprier les meilleurs éléments. D’ailleurs, pour limiter les tentations naturelles de débauchage, des clauses peuvent être ajoutées au contrat de franchise comme celle d’une non-concurrence géographique ou celle de non-recrutement du personnel sur une période donnée. Un sourcing partagé permet de savoir quel personnel de magasin est disponible au moment où un franchisé en proximité se trouve en manque de main d’œuvre.
Réussir le partage en réseau de collaborateurs pour les franchisés
Ce partage de salariés présente de nombreux avantages face aux autres solutions de remplacement. Le plus déterminant : la personne venue d’un autre franchisé est déjà formée et elle connaît les produits. Elle est performante dès son arrivée, car elle sait déjà vendre, sans nécessité de formation complémentaire si ce n’est le bon sens de découvrir les lieux. Ce point est crucial pour maintenir le chiffre d’affaires et la marge opérationnelle, en particulier dans le retail.
Cependant, un outil de staffing entre franchisés ne peut fonctionner que si le réseau est concentré sur une zone réduite pour être efficace et garder une expérience collaborateur motivante. Dit autrement, seules les franchises étendues sur tout le territoire, ou des régions limitées, avec un maillage dense, peuvent en tirer un avantage interne fort. Cela suppose que tous les franchisés participent au projet, mais aussi que les sites les plus proches ne soient pas trop distants entre eux. En effet, la question de la mobilité reste un sujet fort chez les salariés.
L’entraide peut aussi être pensée non pas à l’échelle d’un réseau de franchises, mais à celle d’un groupe de réseau de franchises. Cela suppose une nouvelle organisation des RH autour de la mutualisation des ressources. Ce qui signifie : une direction multimarque, et non plus monomarque, pour favoriser le prêt de personnel et le détachement de personnel. Ainsi, si un franchisé est trop éloigné de son maillage, il peut compter sur ceux des autres marques du groupe qui sont plus proches.
Favoriser un temps de travail à 35 heures
L’usage d’un staffing mutualisé fonctionne aussi pour les magasins situés dans une même zone commerçante. Dans le retail, près de 70% des employés disposent d’un contrat de 18, 20 ou 24h. Or, la plupart aspirent à obtenir un poste à 35 heures. Le partage de salariés entre deux boutiques permet de répondre à cette aspiration. Et un outil de sourcing donne la capacité de piloter l’emploi du temps avec réactivité, souplesse et agilité. Cette solution s’avère plus performante que le prêt de salarié, car dans le retail, le personnel se gère plutôt à flux tendu, et ce tout au long de l’année puisque les périodes de fortes activités commerciales sont à peu près les mêmes partout.
La montagne et la mer sont peut-être les deux zones qui font exception en permettant le prêt de personnel sur une durée liée à la saison hivernale ou estivale. Ici, le prêt sera à temps complet, mais pas de quelques heures par semaine, en raison de la mobilité induite. Elle reste, là aussi, un sujet déterminant : à moins de proposer un logement de fonction, les remplacements s’effectuent depuis les zones de proximité de la montagne ou de la mer.
Le partage des disponibilités des salariés n'entraîne pas l’abandon de l'autonomie du franchisé sur ses choix de recrutement. Il reste le seul décisionnaire en la matière. Loin de là l’idée de gérer collectivement les heures supplémentaires ou complémentaires proposées par chaque franchisé à ses salariés, il s’agit bien d'organiser les partages d'heures et prêts de salariés entre sites pour éviter une chute instantanée des recettes. La réussite d’un tel projet nécessite un engagement maximum. Si peu de franchisés jouent le jeu, quand l’un d’eux aura un besoin, il ne trouvera pas la ressource, et va vite se désengager. Ici, le franchiseur tient une responsabilité forte pour placer le partage de la ressource comme un axe de stratégie. Il tient son rôle en proposant une solution qui simplifie, facilite le quotidien des franchisés sans remettre en cause leur prise de décision, tout en offrant une diversité de missions à ses équipes volontaires pour tenter l’expérience.